Bonne nuit Chef

Le seuil des Lorrains et la retenue de Revins

L'hiver se termine, j'alterne les petits chantiers et les passages au moulin pour travailler à l'atelier avec René, un jour on m'envoie participer à la démobilisation d'un chantier à coté de Nevers le barrage des lorrains, les gars sont dans un hôtel appelé la grenouille comme quoi il n'y a pas de hasard. Sur le chantier j'aide Jean louvet à finir de charger son Tube et sa cabane Hergé, il repart avec son attelage vers Garennes et il me charge avec Yannick Signoret de finir le repli du chantier et ensuite je dois remonter sa voiture une R5 jaune sport au moulin. Pour leur travaux l'équipe avait une grue treillis BONDY, parfois sur un ponton et d'autre fois à terre sur le haut du bajoyer l'endroit ou elle se trouvait à ce moment-là. La grue se tenait sur un terre-plein le long d'un garde-corps en haut du mur rive Gauche, en pied de cet ouvrage, quatre à cinq mètre plus bas, coule l'allier dans un tourbillon violent. Yannick dispose deux futs de 200 litres métallique et descend la flèche de sa grue sur ces cales improvisées, on procède au démontage des câbles et des boulons de la flèche treillis reliant celle-ci au fut de la grue. L'ensemble flèche étant démonté et posé sur les futs, Yannick entame une rotation, le contre poids vers la rambarde et le devant de la grue vers le terre-plein, précipitation, oubli, les patins stabilisateurs ne sont pas complètement descendus, n'ayant plus de poids devant et le contre poids se trouvant perpendiculaire au châssis, la Bondy part en arrière et va plonger dans l'Allier, c'est la catastrophe, Yannick essaye de s'extirper de la cabine avant le plongeon, mais miracle la Bondy se pose sur le garde-corps métallique. Celui se tord, se déforme les pieds sortent du sol ou du moins du couronnement en pierre de taille, c'est la panique et soudain la grue se stabilise en équilibre contre cette ceinture métallique mais ne fait pas le grand plongeon, Yannick arrive a descendre il vient de frôler la mort. Un peu plus tard avec l'aide d'un camion on remettra tout cela sur les roues et on finira notre chargement de fin de chantier, je suis sur que notre scaphandrier Grutier n'oubliera jamais ce moment. 

La retenue de Revins avec les deux bassins

Quelques semaines plus-tard je prend la moto pour rejoindre mon chef Jean Louvet sur les quais des bassins intérieurs du port de Calais, nos travaux consistaient à réparer des affouillements et  les grosses cavités des maçonneries de ces murs. Notre ami jean avec les nouveaux c'est un taiseux, on loge dans une pension de famille dans un quartier de Calais, au style très british, au moment des repas comme sur le chantier « jeannot » est avare de ses paroles, mais c'est un grand bosseur et très professionnel, il me faudra du temps avant qu'il m'accorde sa confiance, et cela se fait petit à petit, on peut pas en dire autant du troisième qui passe son temps a rêvasser sur le chantier ou lire Baudelaire. Après ces quelques semaines à Calais ma nouvelle destination est le barrage de Revins dans les Ardennes, c'est un barrage un peu particulier, le seul en France à cet époque et peut être encore aujourd'hui, c'est un barrage pompage turbinage, Pendant les périodes de forte consommation d'électricité, l'eau du bassin supérieur est turbinée puis stockée dans le bassin inférieur. Pendant les heures de faible consommation, l'eau du bassin inférieur est pompée, grâce aux groupes réversibles pour être stockée à nouveau dans le bassin supérieur. Et ainsi de suite. Bon c'est reparti pour une galère train, Paris Charleville Mézières, puis une Micheline pour Revins, j'arrive dans cette gare sinistre vers 1 h du matin, le préposé ne veut pas que je dorme dans la gare, il gèle à pierre fendre dehors, il me jette à la rue et ferme la gare, bien sur tous les hôtels sont fermés, je déambule dans le noir de la ville avec mes sacs, et soudain j'entends un bruit bien spécifique, celui de nos fameux HY, et je vois les phares, je me met en travers de la rue, c'est Jeannot qui arrive avec son attelage, j'ai jamais été aussi heureux de voir cette cabane de chantier.

Jean :

« qu'est tu fous la ? »

Moi :

« ben je suis arrivé par le train tout à l'heure »

On trouve un endroit pour se garer et on allume le radian sur la bouteille de gaz  dans la cabane de chantier, quel bonheur un peu de chaleur, et nous voila couché l'un contre l'autre sur un matelas de fortune,

Moi :

« Bonne nuit mon chef »

Demain sera une autre histoire on travaillera sur la tulipe du bassin supérieur, mais en attendant j'ai chaud.

© 2016 Patrice Cotty 27240
Optimisé par Webnode
Créez votre site web gratuitement ! Ce site internet a été réalisé avec Webnode. Créez le votre gratuitement aujourd'hui ! Commencer